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314 HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
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les scènes popularisées par la gravure, comme le montre un curieux exemple que le hasard nous a révélé. Un des romans qui obtinrent un vif succès sous le règne de Louis XIII, Y Ariane de Desmarets, livre dont la lecture paraîtrait intolérable aujourd'hui, avait inspiré au crayon 'facile de Claude Vignon une suite d'illustrations qu'Abraham Bosse se chargea de traduire avec Ie burin. Ces compositions n'obtinrent pas moins de faveur que la prose de Desmarets, car nous connaissons deux reproductions bien singulières du frontispice du volume, représentant l'héroïne remettant les rênes d'un cheval à un jeune homme habillé d'un costume des plus étranges. L'une de ces copies, sculptée dans le panneau en poirier noirci d'un cabinet elu temps, appartient au musée de Beims; l'autre, déposée à la bibliothèque de Bruxelles, est exécutée à la plume par un calligraphie contemporain fort habile.
Les tapissiers s'emparèrent à leur tour du roman en vogue. L'auteur de ces pages possède trois pièces du plus beau style Louis XIII, reproduisant les compositions de Vignon pour Y Ariane, notamment la scène du frontispice. La gravure de Bosse aura probablement été traduite en grand par un peintre local qui prend les plus grandes libertés avec son modèle, tantôt substituant un groupe d'arbres à un édifice, tantôt supprimant un personnage. Le résultat, en somme, grâce surtout aux guirlandes de fieurs et de fraits suspendues dans les bordures entre des médaillons à camaïeux, ' ne laisse pas que de produire un effet décoratif assez heureux.
La tapisserie en question, il est vrai, ne porte pas de marque. L'obligation de tisser clans la lisière inférieure le nom du lieu d'origine date seulement de Colbert. Auparavant, les productions des fabriques de la Marche ne se distinguent par aucun signe particulier. Il est donc bien difficile de dire si les pièces inspirées par les inventions de Vignon sortent des ateliers d'Aubusson ou de ceux de Paris. Tout ce qu'il est permis d'affirmer, c'est leur origine absolument française, attestée par le caractère des personnages et le style de l'encadrement.
Il ressort de cet exemple, dans tous les cas, un renseignement précieux sur les ressources que fournissaient aux tapissiers en quête de motifs nouveaux les illustrations des livres à la mode. Nul doute que les chefs des ateliers secondaires n'aient souvent usé de
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